Le Doudou méchant de Claude Ponti

Août 27, 2024 | Recension

Couverture de Le Guichet de la Lune

Du fond d’un coffre, un Doudou, triste et vide, murmure à Oups de le peupler. Une fois gros de plumes, le Doudou et Oups deviennent inséparables.

Si le Doudou est au départ plein de bonnes idées, peu à peu de terribles projets s’empareront de lui et remporteront l’adhésion de son alter ego : « prendre le porte-nez de monsieur Pachinose », enlever les pierres du chemin, vider « les ordures pourries sur le magasin du marchand de légumes frais », « voler la sussouillette du petit Migou-Louyou et la cacher dans la tête de poisson, piège du monstre Pêcheur d’enfants dans lequel tombera le petit Migou-Louyou bien décidé à retrouver sa précieuse sucette.

Jean face à la petite fille

Chassés du village, ils iront jusqu’à forcer les montagnes à se battre et à ainsi réduire le monde en miettes. « Quelque part plus tard, il n’y a plus rien. Plus de matin, plus de soir, juste une pluie de morceaux du monde qui tombe sans bruit sur un désert de ruines. ». En regardant Oups assoupi, les trois géants qui ont vu leur sœur (la montagne chauve) exploser en mille morceaux, s’interrogent : comment un être si petit peut-il être aussi redoutable ?

Au cours de leur cavale, Oups et le Doudou qui ne peut plus murmurer ses méchantes bonnes idées (du fait que Oups lui a enfin sparadraté sa bouche), rencontrent Grabador Crabamorr, le fameux Pêcheur d’enfants. Le terrible monstre met Oups à l’épreuve en cherchant à le fâcher par l’imposition de tâches absurdes. « Si tu réussis à faire tout ce que je te demande sans te fâcher, tu seras libre. Mais, si tu te fâches, même une seule fois, je te mangerai avec les autres enfants. ». Oups ne rentrant pas dans le jeu du monstre provoquera sa terrible colère. Celle-ci aura raison de lui et le fera imploser. Lors d’un grand banquet organisé pour manger les délicieux restes du voleur d’enfant, Oups découvre que le corps de son Doudou abrite une plume en fer. Oups s’interroge : la blessure, le traumatisme qu’elle lui infligeait ne serait-elle pas la cause de ses mauvaises idées ? Une fois la méchante plume retirée par les soins de Oups, le Doudou se repeuplera de bonnes gentilles idées.

Cet album a donné lieu à plusieurs ateliers philo avec des classes de première et deuxième primaires mélangées et une classe de deuxième primaire. Les ateliers se sont prolongés par la création d’un doudou à partir d’une chaussette « toute triste et toute plate ». Il s’est agi de le personnaliser et de la peupler de bonnes idées pour fabriquer un être ensemble de la classe qui rayonne de vitalité (plutôt qu’il ne ressemble aux sinistres ruines du monde défait par la bataille des montagnes). Lors de la confection, il s’agissait aussi d’être attentif aux méchantes idées qui pouvaient se glisser dans le remplissage du doudou. Dans une joyeuse ambiance, enfants et Doudous sont venus se présenter et partager leurs idées avec les camarades.

 

Voici quelques sentes philosophiques explorées, à explorer :

Avez-vous été en contact hier ou aujourd’hui avec quelque chose que vous qualifieriez de mal ou de méchant ?

Qu’est-ce qu’un acte méchant pour vous ?

Ce qui est un mal pour l’un est-il un bien pour un autre ?

Qui décide de ce qui est bien et mal (les parents, les lois humaines, la société, Dieu, une petite voix intérieure, la raison, le cœur…) ?

Est-on méchant exprès ?

Y a-t-il des degrés dans la méchanceté ?

L’ignorance nous fait-elle quelques fois mal agir ?

La méchanceté non intentionnelle peut-elle être pardonnée, excusée plus facilement que si l’acte « méchant » a été fait avec l’intention de blesser ?

Est-ce qu’être méchant, cela a des conséquences ?

Comment se rend-on compte que l’on a été méchant ? Quelle est la sensation éprouvée ? Y a-t-il un plaisir à être méchant ?

Est-ce qu’on préfère être méchant ou gentil ?

Est-ce qu’on naît méchant/gentil ou est-ce que l’on devient méchant/gentil ?

La gentillesse, se cultive-t-elle ? Peut-on travailler à être gentil ?

Mal agir veut-il dire que l’on est méchant ?

À partir de quel moment nos actes font-ils ce que nous sommes ?

Fait-on du mal parce qu’on nous a fait du mal ?

L’humain est-il bon par nature (Rousseau) et devient-il mauvais du fait des circonstances ?

Les blessures jouent-elles un rôle dans notre façon d’être avec les autres ?

Si l’on prend soin des blessures, peut-on améliorer le rapport à l’autre ?

Quelle est la part de responsabilité de Oups ? Pourquoi ne s’oppose-t-il pas aux mauvaises bonnes idées du Doudou ?

Est-il manipulé ? Vous est-il déjà arrivé de faire une chose avec laquelle vous n’étiez pas en accord ? Est-ce parfois difficile de dire non ?

Quel est le rapport de Oups et du Doudou ? Qui influence qui ?

Quel rapport avez-vous avec votre doudou ?

De quelle manière existe-t-il ?

Question récurrente lors des ateliers : D’où vient la plume en fer ? Proposition d’un enfant en guise de réponse : Ne serait-ce pas celle du monstre. Le mal du Doudou viendrait donc du monstre. Mais comment le monstre est-il devenu monstre ? Quelle est l’origine du mal ?

CLAUDE PONTI. Le Doudou Méchant. Paris : L’École des loisirs, 2002.

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